Il y avait hier soir un concert au grand auditorium de la Maison de la radio, proposant la suite Pelléas
et Mélisande de Gabriel Fauré, le concerto pour violon et orchestre en ré majeur de Ferruccio Busoni,
et la 2è symphonie de Johannes Brahms, sous la direction de James Gaffigan. J'y étais!
J'avais une place en "corbeille choeur" (car c'est là que sont placés les choristes dans les concerts
où ils ne peuvent être placés sur la scène), en catégorie 3, ce qui correspond habituellement à une vue
et une audition excellentes. Cependant, l'Education nationale avait dépêché une classe de collégiens de banlieue,
gentils mais à mon avis sans suffisamment de pré-requis (comme dit l'EN) pour profiter pleinement du concert, et donc,
pour certains, s'agitant à défaut de s'intéresser pleinement. C'est normal, j'ai été professeur d'éducation artistique en 4ème
de lycée professionnel, un concert symphonique était aux antipodes de ce que mes élèves écoutaient habituellement.
Il y avait une collégienne agitée devant moi, que j'ai admonestée après le concerto, qu'elle m'avait empêchée d'apprécier
normalement. Un peu plus que je ne l'aurais voulu, mais pas inutilement car en deuxième partie, les collégiens furent
regroupés de l'autre côté de la corbeille, et nous avons pu écouter la symphonie dans des conditions normales.
L'intention du collège était sûrement louable, mais mal adaptée au public ordinaire de la salle, qui était mélangé
avec les collégiens, et avait néanmoins le droit d'entendre ce concert dans des conditions normales d'écoute.
De plus le concert était diffusé en direct sur France Musique... il fallait donc le silence dans les rangs.
Certains collégiens ont quand même montré beaucoup d''attention et d'intérêt, qu'ils en soient félicités.
Le concert commença par Pelléas et Mélisande de Fauré, suite en 4 mouvements. Comme souvent
dans une œuvre musicale, un mouvement est plus marquant que les autres, ici c'est le troisième,
une valse contenue, débutant par un duo de flûte et de harpe, repris par les violons. Quoique ce mouvement
se nomme « Sicilienne », on y verrait volontiers l'élégance et la douceur de la Belle Epoque, en cette année
1901. Sur le livret, je vois que Vladimir Jankélévitch (l'un de mes philosophes préférés) a écrit un ouvrage intitulé
« Fauré et l'inexprimable », qu'il faudra se procurer ! La grâce de Pelléas et Mélisande captiva
tout l'auditoire, même les collégiens. C'est avec le concerto pour violon de Busoni que les choses
se gâtèrent... Quoique contemporaine de la suite de Fauré, cette oeuvre de Busoni avait une sonorité plus
moderne et plus stridente, "des glissandi, avec des emportements d'orchestre", disait le livret. C'était
peut-être un peu difficile pour nos collégiens, et c'est pendant ce morceau que la perturbation fut la plus forte.
Renaud Capuçon joua en virtuose, mais je n'ai souvenir d'aucune émotion liée à cette oeuvre,
tant elle fut parasitée, à part beaucoup d'agacement. Après l'entracte, et la mise au point sur la bonne conduite
dans une salle de concert, la symphonie n°2 de Brahms, pastorale et joyeuse conquit de nouveau l'auditoire.
Le jeune chef américain James Gaffigan, dont une photo particulièrement glamour ornait le livret,
charismatique,dirigeait avec beaucoup de maîtrise et n'épargnait pas sa peine.