Hier soir, sous une petite pluie, je suis allée entendre un concert "Grandes pages de Frédéric Chopin",
aux chandelles, en l'église Saint-Ephrem, rue des Carmes, dans le Vè arrondissement de Paris.
C'est une petite église en retrait de la rue, de culte catholique syriaque.
J'entre munie de la contremarque de réservation, et reçois un programme à l'entrée.
Je prends quelques photos de cette jolie église, petite par la taille, mais dont, selon le programme
l'acoustique serait remarquable. Le décor oriental est aussi remarquable. Pour l'instant, il n'y a
que des auditeurs qui attendent parmi les tableaux, face à un piano à queue.
On nous demande d'éteindre nos téléphones, et de ne pas filmer. Heureusement que j'ai pris
quelques photos des lieux avant le concert! Pascal Mantin, le pianiste, entre et nous détaille
le programme pièce après pièce, dans le silence respectueux de l'auditoire. Il joue dans une
extrême concentration, sans partitions, et son corps prolonge l'instrument. Même si l'on nous avait
autorisés à filmer, je crois que je m'en serais abstenue par respect pour une telle concentration, fascinante.
De plus, prendre des photos ou des vidéos pendant un concert, c'est changer de rôle, passer de la communion
subjective du public avec l'artiste, à la position objective du témoin extérieur, bascule inconfortable.
Notre pianiste a un jeu fin et très rapide, idéal pour les notes virevoltantes de Chopin.
Nous attendons qu'il sorte de sa concentration après chaque pièce pour applaudir. En regardant
l'église, je pense que l'on peut joliment associer des styles musicaux et des styles architecturaux
aux références culturelles différentes. Dans la marche funèbre, 3ème mouvement de la sonate n°2, la pluie
qui a repris de la vigueur ruisselle sur le porche de l'église. Et soudain, cette source sonore imprévue se lie à
la musique et aux chandelles pour créer une ambiance crépusculaire... Si le motif musical change, la synergie
sonore disparait, ce n'est plus qu'un bruit en marge. Si le thème principal revient, le ruissellement augmente
la teneur funèbre de la scène. J'essaie de comprendre, mais je n'y comprends rien! (hitchcockien?)
Le concert se poursuit, notre pianiste, virtuose, est très applaudi et qualifie les trois études qui
concluent le concert de "plus difficiles" puisque ce sont des études. J 'en déduis que le reste du programme
était, selon lui, plus facile... Il est rappelé plusieurs fois à la fin, et nous joue une pièce de Debussy.
A la sortie, je lui aurais volontiers parlé de la synergie crépusculaire du ruissellement de la pluie
avec le thème de la marche funèbre et les chandelles, mais il parle déjà avec d'autres personnes...
Et puis c'est une préocupation de physicienne mélomane. Je poserai la question à Matthieu!
A la sortie, la pluie ne ruisselle pas que sur le porche et le vent retourne les parapluies...
Sylvie, blogmestre